Si belles et si fragiles

En dix ans, l'image de la Tunisie rendant grâce à ses femmes pour ce qu'elles portaient d'espoir en elles est devenue flou. Écartées du remaniement ministériel du 14 janvier 2021, le retour au temps d'avant n'est pas impossible...

La Tunisie occupe la quatrième place en matière d'égalité homme-femme dans le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord réunis. Le taux d'alphabétisation est le plus élevé (72 %) chez les femmes à l'instar de la représentation politique nationale (36 %). Parmi les Tunisiens, près de la moitié de la population ayant poursuivi des études supérieures sont des femmes (46 %).

Cette étude statistique 2020 du Forum économique mondial sur l'inégalité homme-femme est loin de présenter une carte postale idyllique. Les clichés tombent et les espoirs avec. En dix années, la tendance s'est inversée. La Tunisie, qui a tutoyé le bas du panier dès 2006, a désormais touché le fond de la piscine.

Le chômage s'écrit au féminin

Sur tous les tableaux, les chiffres sont alarmants. Sur 153 pays observés, la Tunisie est classée 142e (sur le plan de participation des femmes à l'économie), 106e (éducation), 67e (politique).

Près d'un quart de la population au chômage concerne les femmes. Dans les régions de Gabès, Kasserine, Jendouba, Kebili, Gafsa et de Tataouine, le taux de chômage au féminin atteint 35 %.

L'inégalité entre les genres subsiste toujours. Les violences physique, sexuelle, psychologique ou économique faites aux femmes perdurent de façon sourde. Les femmes subissent ce qu'ont connu leurs mères et grands-mères dans les années 60-70.

Retour au temps d'avant

Si la femme tunisienne est de plus en plus présente et active dans les secteurs de la santé, l’éducation, la fonction publique et le secteur privé, c'est parce qu'elle est capable d’innover. Selon le responsable des opérations pour la Banque mondiale de la Tunisie, « elle intègre les secteurs d’avenir, les start-up les plus sophistiquées et maîtrise les métiers les plus pointus (...) »

Reste à savoir si la Tunisie, « pionnière en matière d’égalité des genres », encourage ce vent nouveau en protégeant la femme tunisienne des ignominies de ceux qui défendent le retour au temps d'avant...

Jacques BLEUZE